Ordre de la rose blanche

2022

GÉNIE DE NATURE

La rencontre de Sophia Roy avec le génie s’est faite tout naturellement alors que la jeune femme, sensibilisée très tôt aux questions environnementales, cherchait des solutions au dérèglement climatique. « À l’école, on nous a souvent parlé de la crise écologique. Je me suis dit que je devais faire quelque chose pour aider », se rappelle l’étudiante d’aujourd’hui 23 ans qui a complété avec une moyenne quasi parfaite un baccalauréat en génie chimique à l’Université McGill. « Pour moi, le domaine qui allait me permettre d’avoir le plus grand impact, c’était le génie. »

Enfant, elle avait été marquée par un documentaire sur la célèbre primatologue Jane Goodall, qui a voué sa vie à la protection de la biodiversité. « J’avais dit : " Je veux être comme elle ! " ». Ce film avait semé en elle les graines d’une carrière qui embrasserait la vision de la science qu’elle a aujourd’hui : la recherche appliquée au service des défis environnementaux causés par l’activité humaine.

Ce n’est donc pas par hasard si Sophia Roy, dont l’excellence lui a permis de commencer un parcours accéléré au doctorat à Polytechnique Montréal, étudie les méthodes pour décarboner l’acier. Pendant son baccalauréat, cette étudiante d’exception, qui a reçu la médaille du Lieutenant-Gouverneur du Québec, avait déjà commencé à faire de la recherche sur les matériaux protéiques biodégradables pour pouvoir réduire l’empreinte écologique dans la fabrication de panneaux solaires. Constatant le besoin de standardisation des pratiques dans le domaine, elle avait même publié un article scientifique de synthèse qui a été l’un des plus téléchargés du Canadian Journal of Chemical Engineering en 2020.

À l’été 2021, lors d’un stage au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, elle a élaboré un calculateur permettant de convertir en nombre de voitures le tonnage des émissions de CO2 d’un projet de gaz naturel liquéfié du gouvernement du Québec. Son outil a eu un écho jusqu’au ministre qui s’en est servi pour expliquer à la population pourquoi il n’irait pas de l’avant avec ce projet générant trop de gaz à effet de serre. Pas mal pour une stagiaire qui rêvait d’avoir un impact concret !

« Chaque fille curieuse devrait être exposée au monde du Génie », croit la nouvelle lauréate de l’Ordre de la rose blanche, qui s’estime privilégiée que d’autres femmes avant elle aient pavé la voie. À commencer par sa mère qui, un an après le féminicide de Polytechnique, y entreprenait des études, sans laisser la peur ni le découragement dévier sa trajectoire. « Ma mère m’a toujours dit : " Il faut que tu fonces. " »

C’est pour passer ce message à son tour que Sophia Roy, en plus d’avoir organisé des rencontres et des activités de réseautage notamment à titre d’élue dans sa communauté étudiante, a agi comme mentore auprès des nouvelles étudiantes au baccalauréat. Pendant la pandémie, la jeune femme douée et créative, qui s’adonne à la peinture et la danse dans ses temps libres, a même trouvé du temps pour donner bénévolement des ateliers scientifiques virtuels à des élèves du primaire.

Pour garder l’équilibre, elle se réserve des moments loin des écrans. « J’aime être dans la nature », dit-elle. Au contraire des sentiers sinueux où elle aime randonner, Sophia Roy sait très bien où elle va.

Sophia Roy, récipiendaire de la bourse de l'Ordre de la rose blanche 2022

Photo : Caroline Perron