Ordre de la rose blanche

2019

Édith Ducharme, récipiendaire de la bourse de l'Ordre de la rose blanche 2019

Un équilibre parfait

Il suffit d’entendre le ton dynamique de son « allô » lorsqu’elle répond au téléphone pour saisir toute la force de la personnalité d’Édith Ducharme. La lauréate 2019 de l’Ordre de la rose blanche ne manque pas non plus d’enthousiasme lorsqu’il s’agit de parler de son projet de recherche à la maîtrise en génie physique à Polytechnique Montréal sous la direction de Caroline Boudoux. Après un préambule bien vulgarisé, on comprend qu’elle travaille à mettre au point un coupleur en verre fluoré, une fibre optique qui permettrait des thérapies laser à l’efficacité d’ablation environ 2000 fois plus élevée que celle de la silice actuellement utilisée, et qui pourrait révolutionner la chirurgie médicale.

Mais en parlant davantage avec la jeune femme de 23 ans, on comprend surtout pourquoi cette leadeuse née — elle insiste sur la féminisation — se démarque par son implication sociale. Tables rondes avec des femmes scientifiques de renom, 5 à 7 de réseautage, conférences. Durant son baccalauréat à l’Université Laval, l’étudiante, qui est aussi une pianiste accomplie, a organisé de sa propre initiative plusieurs événements qui avaient pour but d’encourager la présence des femmes en génie.

L’élément déclencheur de son engagement? Une recherche sur la progression-rétention de la gent féminine dans les métiers traditionnellement masculins effectuée pour la Chaire de leadership en enseignement de l’Université Laval. Si les femmes sont heureuses en génie et y restent une fois qu’elles y sont, il est toutefois plus difficile de les attirer dans la profession, avait-elle constaté. « En analysant la littérature, j’ai pu voir à quel point l’absence de modèles, notamment au cégep, m’avait affectée, moi », soutient l’étudiante, qui a voulu combler ce vide en montant une conférence sur les débouchés des carrières en génie au niveau collégial. « Je voulais parler de mon expérience et montrer qu’il était possible d’aimer la physique et les maths tout en ayant plein d’autres domaines d’intérêt, comme la musique. »

Édith Ducharme ne s’en cache pas : elle ne s’est pas toujours reconnue dans le modèle de l’étudiante ayant tout misé sur les études de génie pour avoir des notes frisant la perfection. Si elle a légèrement tardé, au début de son baccalauréat, à atteindre sa vitesse de croisière, elle est aujourd’hui fière de sa réussite et de l’équilibre qu’elle a trouvé dans son cheminement universitaire. « Je suis quelqu’un de multidisciplinaire. Je sens qu’on va de plus en plus vers ce type de collaboration, mais en ce moment, les critères d’excellence définis par les organismes subventionnaires ne reflètent pas ça », analyse-t-elle. « C’est important de valoriser des parcours d’étudiants et d’étudiantes qui ont développé des champs d’intérêt divers, même s’ils ont de moins bonnes notes. »

Et c’est là que, pour elle, la bourse de l’Ordre de la rose blanche prend tout son sens. « Quand j’ai réalisé qu’il avait été si difficile pour moi de choisir la carrière en génie parce qu’il m’avait manqué de modèles, je me suis dit que la meilleure façon de redonner au suivant, c’était de veiller à devenir le modèle que j’aurais voulu avoir. L’Ordre de la rose blanche est un solide pas dans cette direction. »